Elles parlent du toit, elles parlent de moi… les girouettes
- Cuirassé, provenance non connue, début XXe s.
- Lion et serpent, provenance non connue, XVIe-XVIIIe s
- Laboureur sur la maison de maître de L'Ebeaupin à Mézières-en-Brenne, 1807 sur épi XVIIIe s.
- Chasse à tir au cerf à Dun-sur-Auron (Cher), 1833
Archives départementales de l'Indre
1 rue Jeanne d'Arc
36000 Châteauroux
Téléphone : 02 54 27 30 42
Télécopie : 02 54 27 85 60
archives.indre@cg36.fr
Elle ne sert plus guère, la pauvre, car Météo-France fournit de nos jours une prestation plus exacte.
Le Berry est pourtant une terre riche en girouettes, et nous devons à un savant « girouettologue » d’Issoudun, M. Marcel Suhard, retraité de l’enseignement public, de pouvoir approfondir une richesse berrichonne méconnue. Partis d’enquêtes sur les arts et traditions populaires vers 1989-1990, M. et Mme Suhard ont recensé un millier de girouettes à motifs dans l’Indre et le Cher. Ils ont ouvert leur grand cœur et leur petit garage aux girouettes abandonnées, méprisées, victimes des rénovations et des démolitions. Puis ils se sont mis à collecter dans toute la France des girouettes anciennes, devenant habitués des brocantes et familiers des ferrailleurs. Fort adroit, M. Suhard échangeait même des originaux en mauvais état contre des copies neuves qu’il réalisait. Il possède maintenant une collection de plus de 400 girouettes, chacune portant son message, qu’il présente dans des musées de la France entière, et au monde sur un site internet ( http://girouettes-expos.fr/ ). Un bel échantillon de 60 specimens sera exposé aux Archives départementales de l’Indre du 2 juillet au 31 août 2012.
Du XIVe siècle aux années 1970, une grande variété de girouettes se découpe dans la tôle, le fer-blanc ou le zinc : sous l’Ancien Régime, on trouve surtout le coq sur le clocher de l’église, symbole du Christ ressuscité (« au chant du coq l’espoir revient » dit un hymne latin), ou le symbole nobiliaire (étendard ou animal) du manoir. Ces signes de superstition et de féodalité sont interdits à la Révolution, mais ils réapparaissent avec d’autres, démocratisés, sécularisés, signes extérieurs de richesse non imposable, signalant aux passants le travail et la vie quotidienne, le rêve, la passion du propriétaire. Le laboureur de Mézières-en-Brenne pousse son araire, tandis que l’éleveur de Dolus-le-Sec en Touraine mène son bétail ou sa carriole au marché voisin de Loches. Plus aristocratique, un cavalier chasse le cerf à Dun-sur-Auron. Des habitués d’un café trinquent à Saint-Août… Des animaux familiers ou extraordinaires sont présents, le cheval compagnon quotidien du voyage ou de l’effort, la girafe offerte par le sultan d’Egypte au roi Charles X et le dromadaire aux parfums d’exotisme.
La grande histoire n’est pas loin : on pourra lire le passage consacré à Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord dans un Dictionnaire des girouettes paru en 1815, qui comporte 1200 noms. Le châtelain de Valençay y figure avec le record de douze girouettes, égalé par son collègue Fouché ! La malignité a fait de certains hommes politiques des girouettes : préférerait-on qu’ils aient été des bornes ? Concluons avec la phrase du subtil Edgar Faure : « Ce n’est pas la girouette qui tourne, c’est le vent ».
Marc du POUGET
Directeur des Archives départementales et du Patrimoine historique de l'Indre