La petite reine salue son roi
Le 5 décembre dernier, Jean-Luc Pernet, Pascal Mouré et Bernard Mousseau étaient conviés à la cérémonie de remise de prix des 36 d’Or aux sportifs du département. Le trio organisateur de la course cycliste professionnelle internationale Classic de l’Indre recevait le 36 d’Honneur 2014. Un prix spécial du Département qui tient à rendre hommage à leur travail et l’implication des 1 200 bénévoles et maires qui les accompagnaient dans la réussite de cette grande fête populaire. Un trophée de plus pour la Classic mais le dernier sans doute puisque l’épreuve est arrêtée. Jean-Luc Pernet a annoncé l’annulation de la course 2015 lors d’une réunion extraordinaire en octobre. Une décision prise, non sans mal, par cet homme passionné de vélo mais qui explique les raisons de ce choix.
“Lassitude”
Après dix ans à la tête de Classic de l’Indre, Jean-Luc Pernet démissionne. « Je me sentais particulièrement usé par les contraintes administratives. » En menant de front toute l’année son activité professionnelle avec la Classic de l’Indre, il a fini par craquer. « Tout ce qu’on nous impose pour organiser la course était devenu insupportable. J’étais 365 jours de l’année dedans en préparant l’épreuve vingt mois à l’avance. » Après la pression de la dixième édition fêtée comme il se doit en 2013, la mobilisation considérable des acteurs et des moyens à solliciter en permanence a fini par le décourager.
Un choix irrévocable ?
Cet arbitrage n’a pas été facile et n’est pas sans regret pour ce passionné de vélo. Après quelques mois de recul, il sait pourtant qu’il a pris la bonne décision. « Rien ne me fera revenir sur ce choix. J’aurais préféré que la Classic perdure mais je n’ai pas réussi à trouver de successeur et je n’avais plus la niaque pour me battre. Après m’en être rendu malade, je me sens aujourd’hui libéré d’un poids. Je voulais déjà arrêter il y a deux ans mais le décès d’Yves Fouquet en septembre 2013, ancien Vice-Président du Conseil général délégué à la Jeunesse et des Sports, m’a poussé à tenir une année de plus. Je tenais à lui rendre hommage en lui dédiant la dernière édition. J’ai donc préféré garder le silence pour ne pas démotiver, ni décevoir les gens qui m’accompagnaient. »
“C’est un travail de fou ! Chaque édition exige un repérage d’une journée à quatre sur la route pour définir le parcours, des démarches auprès des mairies pour trouver les bénévoles, des autorisations en préfecture pour les signaleurs imposant d’établir une fiche détaillée pour chacun indiquant notamment le nom et numéro de permis de conduire pour les habiliter. Rien que pour la sécurité de la route, 671 personnes ont été mobilisées l’année dernière, sans compter les forces de l’ordre. Un jour il ne sera plus possible de mettre en place une telle organisation. À cela s’ajoutent les cinq papillonnages obligatoires pour les véhicules. 5,5 kg ! C’est le poids d’un dossier pour la Classic déposé en préfecture. Il faut également citer les quelque 130 panneaux à installer à Châteauroux, complétés par des courriers et appels pour avertir les habitants. Malgré toutes ces démarches, on se faisait engueuler ! Et puis, il faut sans cesse solliciter et relancer les gens. Réussir à boucler le budget est compliqué. Les partenaires, comme les coureurs, sont de plus en plus difficiles à trouver. Ce qui se passe dans le vélo n’est pas encourageant. Depuis la mise en place du ProTour par l’Union Cycliste Internationale (UCI), il n’y a plus que lui qui compte. Les équipes ne vivent que pour ça. Pour attirer les cyclistes de renom, il faut faire partie des 27 épreuves labellisées UCI ProTour. Bien entendu, en faire partie représente un coût qui augmente d’autant en cas de changement de catégorie. Or, si on ne peut pas valoriser la course, il est impossible d’y arriver. Malheureusement aujourd’hui, le vélo professionnel est organisé par deux mondes qui s’opposent : celui des bénévoles et celui des passionnés qui en vivent. Amaury Sport Organisation, qui organise le Tour de France, détient le monopole et on ne peut pas lutter contre lui. »
“Une très belle aventure humaine”
C’est ce que retient J.-L. Pernet de ses dix années consacrées à la Classic et des dix précédentes dans l’organisation du Crytérium aux côtés de Christian Fenioux. « Il faut effacer les mauvais souvenirs et ne garder que les bons. J’ai eu la chance de croiser des gens sympathiques et dévoués, de faire de belles connaissances qui ont évolué en amitié. J’ai pu mettre en valeur le département et je garde de belles images sur les bords des routes. Notamment un passage à Sainte-Sévère l’année dernière qui m’avait mis les larmes aux yeux. Le maire s’était investi considérablement et j’étais épaté par la mobilisation des gens sur le parcours. Je pense aussi aux près de 6 000 bénévoles qui nous ont suivis avec Pascal et Bernard sur les différents parcours depuis dix ans. Toutes ces belles choses, personne ne pourra me les enlever. Un jour, une maire est venue me voir quelque temps avant la course pour me dire qu’elle n’arriverait jamais à mobiliser ses habitants pour participer à l’organisation. Nous avons organisé une réunion d’information et, grâce à nous, elle a réussi non seulement à trouver des bénévoles mais aussi à fédérer le mouvement associatif. On a toujours pu compter sur les bénévoles. L’Indre en compte plus que d’habitants ! »
Berrichon d’adoption, il entend bien aujourd’hui se reposer, consacrer beaucoup plus de temps à sa famille et profiter de ses petits-enfants qui vivent en région lyonnaise. Ce qui ne l’empêchera pas de conserver un regard avisé sur le vélo et de garder ses habitudes du matin : prendre un café et lire L’Équipe.
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